Un dimanche chez les Toffinous
Article mis en ligne le 18 octobre 2009
dernière modification le 5 février 2013

Pour illustrer ce dimanche qui clôture la semaine de prière et de partage pour les Missions, nous vous proposons la lecture d’un article paru le samedi 3 octobre dernier sur le site de la Société des Missions Africaines.

Bénin : Un dimanche chez les Toffinous* ! ou Les Joies du missionnaire !

A vrai dire, mon dimanche 13 septembre 2009, a commencé le samedi matin à 6 heures. Je prenais la route en effet, depuis Akpakpa pour aller à l’ordination de 6 nouveaux prêtres à Lokossa (125 km de Cotonou) en compagnie d’un jeune prêtre diocésain, Maurice et d’un diacre SMA, Anselme.
A cette heure-là, pas de "bouchon" sur la route. Nous étions bien avant l’heure prévue pour le début à 9h30.
La célébration a été très belle, mais a commencé à 10h et s’est terminée à 14h30. Le temps de prendre un petit rafraîchissement, c’était un peu tard pour que nous puissions arriver avant le rush de Cotonou.


En effet, à 15km de Cotonou, à Pahou, a commencé le bouchon : arrêt tous les 3 ou 4 mètres. Peu avant Godomey, mes vitesses se bloquent. Plusieurs fois, je bloque aussi le "bouchon" ce qui provoque un concert de klaxons ! Par chance, j’arrive à hauteur de la maison des jésuites. Après un dernier blocage au milieu de la chaussée, pour tourner à gauche, nous passons. Il ne nous reste plus qu’à appeler le mécanicien (qui est à Dassa, à 200 km !) et à confier la voiture au père Richard, jésuite. Et chacun prend son zèmidjan* (taxi moto) pour rejoindre sa destination.

Je dois me rendre à Lokpo au milieu du lac de Ganvié où le curé, Hervé m’attend.

Je l’appelle au téléphone (vive le portable !) et on se donne rendez-vous à l’entrée du chemin qui mène à sa paroisse. Pas loin de ¾ d’heure en moto, ma valise sur le guidon du "chauffeur", se faufilant entre les voitures et les camions. Nous arrivons ensemble au point donné et je monte avec ma valise sur la moto d’Hervé, 13 km de piste de plus en plus étroite. Puis, je chausse des bottes pour embarquer dans la pirogue sur laquelle est écrit en grosses lettres « Paroisse Saint Ambroise ». Nous arrivons 20 minutes plus tard (grâce au moteur hors-bord) à la mission. Il est 19h30. Il fait nuit depuis un bon moment déjà. Le perron du presbytère doit avoir 5 ou 6 marches, mais l’eau arrive à la dernière du haut. On débarque sans problème.
Ma chambre est très simple : une moustiquaire pour le lit, un tonneau d’eau pour la toilette et 2 bougies feront l’affaire !
Le matin, première messe à la paroisse Saint Ambroise à 7 heures. L’église est à 100 mètres du presbytère mais il faut y aller en pirogue. L’eau entoure l’église à 20 centimètres au dessous du sol. Les chrétiens sont très nombreux et elle est trop petite. Beaucoup de chrétiens suivront la messe depuis leur pirogue.
Puis nous partons pour la station secondaire*, Saint Joseph, pour la messe de 9 heures. L’enfant de chœur qui nous accompagne a trouvé une nouvelle fonction : il écope la barque qui fait eau avec une pelle en plastique ! Nous faisons le tour pour atteindre la sacristie. Il y a 40 cm d’eau dans la sacristie comme dans l’église. J’enlève mes chaussures et mes chaussettes, mais les chrétiens trouvent une autre solution : la barque refait le tour de l’église, on ouvre en grand les 2 portes principales et la barque fait son entrée solennelle avec le servant et les 2 concélébrants. Le nez de la pirogue se pose doucement sur la plus haute marche de l’autel, la seule visible, et nous montons à l’autel "à pied sec" ! Les fidèles ont placé les bancs côte à côte et sont montés dessus, debout ou assis. Les plus courageux restent les pieds dans l’eau. A notre suite, une dizaine de barques pénètrent dans l’église et s’installent dans le fond d’où leurs propriétaires pourront suivre confortablement la messe. Les retardataires restent tout autour de l’église dans leur pirogue.
Nous reprenons notre barque pour une troisième chapelle : le Bon Pasteur. L’eau est plus haute que les marches de l’autel. La chapelle est vide. Mais nous apercevons les chrétiens sous la véranda de l’école non loin de l’église. Il n’y a que 10 cm d’eau dans l’école. Ils ont mis tous les bancs de l’église côte à côte sous la véranda et placé une table à cheval sur les bancs. C’est un peu bas comme autel ! Nous la remontons sur les bancs même et toute la communauté est bientôt là, chacun avec sa barque. La messe peut commencer. Notre piroguier est aussi photographe. J’espère qu’il aura pris quelques vues réussies en souvenir de ce jour.
Voila une matinée bien remplie. J’ai été heureux de faire connaissance avec ces communautés pauvres, mais joyeuses et priantes. Leur problème en ce moment est que leurs champs sont inondés et que les poissons sont rares étant donné la grande étendue d’eau provoquée par la crue. Il faut attendre que les pluies cessent dans le nord du pays pour que le fleuve retrouve son lit. Avant mon départ, le président du conseil paroissial me fait cadeau d’un beau poisson de 4 kg qu’il vient de pêcher dans le lac.
Le retour va se faire l’après midi sans problème. D’abord les 20 minutes de pirogue, puis le vicaire me ramène à la maison régionale (30 km) avec sa moto. Quelques courbatures dans les jambes qui auront vite disparues. Le garagiste est parti chercher ma voiture et me la ramènera demain.
La vie missionnaire, c’est … formidable !

André Chauvin, SMA à Cotonou-Akpakpa, Bénin.

Quelques précisions...
 Toffinous : Le lac Nokoué, vaste étendue d’eau saumâtre de 160 km2 en saison sèche qui triple sa surface en période de crue. Séparée de l’océan Atlantique par un large cordon littoral, il retient les eaux douces de la rivière Sô et communique avec la mer par le chenal de Cotonou, port et capitale du Bénin. Cette région de mangrove à salinité variable, poissonneuse et appréciée des touristes, est appelée Toffin, d’où le nom de ses habitants les Toffinous...
 zèmidjan : taxi moto, littéralement "emporte-moi vite". Moyen très répandu de gagner un peu d’argent à condition d’avoir la moto... et seul moyen de transport pour beaucoup.
 station secondaire : autre communauté paroissiale et autre église de la paroisse.

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